[Exposition – Critique] Martin Parr – Paris

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Cela fait maintenant plus de trente ans que l’Association Paris Audiovisuel et la Maison Européenne de la Photographie proposent régulièrement à de grands photographes une carte blanche autour de leur vision de Paris. Après des photographes aussi illustres que Cartier-Bresson, Gibson ou Klein, c’est à Martin Parr, autre nom tout aussi fameux de livrer à travers ses clichés comment Paris résonne en lui.

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Toujours aussi mordant, l’ironie au bout de l’objectif, Martin Parr n’abdique pas. La moquerie toujours bienveillante, il continue d’observer les petites incohérence du monde, les absurdes et parfois grotesques comportements de ses concitoyens. Dans la masse, nulle autre beauté que celle de l’incongruité tournée en dérision.

Martin Parr ne porte pourtant jamais dans son œil de jugement supérieur ou de méchanceté gratuite. Il capte les improbables attitudes d’un monde rassuré par les conventions, les douteuses postures de diverses communautés, quelles qu’elles soient (religieuses, touristiques, bourgeoises…), qui adoptent toutes la conduite qui rassure, jusqu’à en perdre le bon sens. Jamais méprisant, il garde une bienveillance agréable qui donne à ses clichés un ton sucré gourmand, une friandise qu’on apprécie sans culpabilité : se moquer des défauts des autres, jusqu’à trouver dans un des autres clichés l’absurde qui nous caractérise à notre tour. On rit d’autant plus fort de soi qu’on a ri des autres. Et inversement.

Travers croqués, en vrac: Le touriste et son admirable capacité à adopter sans retenue la balise ; paradoxale attitude pour celui qui cherche à découvrir, il passe son temps à se fondre dans une masse nourrie aux mêmes repères. Capable d’attendre des heures sous la pluie pour être là où il faut être, au lieu de se perdre ailleurs (Notre-Dame de Paris), de s’agglutiner jusqu’à l’entassement autour d’un arrêt de bus, alors qu’autour un immense espace l’appelle, ou capable encore de s’afficher derrière des grillages comme un troupeau gardé par deux chimères, le touriste assume la perte de son individualité au profit du groupe et d’une culture partagée, semble-t-il. Parr se moque ainsi des parcours touristiques aux signaux bien trop définis, et de l’attitude prudente des touristes, rassurés à l’idée de les suivre : qui ne s’est pas retrouvé un jour coincé dans ces chemins du collectif, jusqu’à se rendre compte de l’incongruité de la situation ?

Ou encore:
La bourgeoise botoxée enfermée dans des codes absurdes révèle l’oeil malin du photographe, qui chasse aussi le ridicule du communautarisme social : en affichant avec outrance son appartenance au groupe, elle est rejetée -c’est bien ce qu’elle recherche- par ceux qui n’appartiennent pas à la tribu. Aussi ridicule que volontaire, la démarche est sans doute identique pour toute communauté…

C’est donc le cliché que moque Parr, le stéréotype grossier et l’archétype excessivement mis en avant. Sans aucun complexe, il transcende la méchanceté par l’audace de l’effronterie. Paris a beau être “la plus belle ville du monde“, la ville “lumière” n’en éclaire pas moins les mêmes travers que dans le reste du monde.

Rick Panegy

 

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A la Maison Européenne de la Photographie jusqu’au 25 mai 2014.

 

 

 

 

 

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