[alert variation=”alert-info”]A la péniche La Pop, Le Birgit Ensemble, fondé par Jade Herbulot et Julie Bertin, a présenté Cabaret Europe : un récit mythologico-politique, où les auteurs posent leur regard sur une Europe en pleine mutation.[/alert]
A La Pop, on a pu assister à une sorte de “teasing” excitant de ce que présentera Le Birgit Ensemble cet été au Festival d’Avignon : Cet été, Mémories of Sarajevo et Dans les ruines d’Athènes feront les beaux jours du Gymnase Paul Giera. Deux spectacles qui viendront conclure la tétralogie entamée par Le Birgit Ensemble autour de l’Europe, après Berliner Mauer et Pour un prélude.
Ici, en résidence à La Pop, le Birgit ensemble a pu élaborer et mettre sur pied les prémices de ces deux spectacles, en en créant une forme hybride : intitulé Cabaret Europe, le spectacles englobe les deux longues formes qui seront présentées à Avignon. Une heure de cabaret où se mêlent les allégories de Europe, fille de Zeus, et son amertume face à ses errances en basculant dans le 21ème siècle ; son désarroi face au déclin économique de la Grèce, ou face à la guerre de Sarajevo, un Cabaret où se mêlent aussi les discours d’Alexis Tsipras, une incarnation ironique et pathétique d’Angela Merkel, une résurrection de Kurt Cobain décapante, ou des archives sonores des émissions de télévision ou de radio… On replonge dans le concours de beauté de miss Sarajevo improvisé, symbole d’une résistance éperdue de cette guerre des Balkans, qu’avait capturé en images le vidéaste Bill Carter, et dont nous pouvons voir dans un coin de la scène la célèbre photographie. “Don’t let them kill us” clame alors la bannière des miss, imaginée par l’activiste Janez Tadic. Des mots qui semblent se faire l’écho de ceux que prononcerait Europe, en contemplant le délitement de son union…
Sur scène, où les comédiens chantent, s’adressent au public comme à des témoins inactifs à qui on voudrait donner le souffle du courage et celui de l’agir, les musiciens accompagnent en live une partition scénique multiple et hybride, faite de théâtre, de chants, de discours d’archives… Faisant fi, comme toujours chez Le Birgit Ensemble du quatrième mur, et partageant avec le public regards, sourires, verre de vin, apéritif ou communion finale, la troupe engage un dialogue de conviction avec le spectateur, qui soudainement rappelé à son identité de citoyen européen, ne ressort pas indemne de toute réflexion autour de l’Europe…
A l’heure du Brexit et des volontés de repli de certains partis conservateurs, le travail de Jade Herbulot et de Julie Bertin prend une tout autre dimension… Le Cabaret s’achève sur 28 bougies encerclant Europe, chantant. Elles continuent, vacillantes, de briller. Cet été, il ne devrait peut-être plus en rester que 27 sur le plancher de la scène…
Voilà donc qui met l’eau à la bouche : vivement les formes finales présentées à Avignon, quand bien même ce Cabaret Europe se suffit déjà à lui-même. Et voila qui donnent envie de retourner sur cette péniche, qui (co)produit des formes ambitieuses 😉
Avec Eleonore Arnaud, Antoine Louvard, Pauline Deshons, Anna Fournier, Marie Sambourg et Anaïs Thomas, tous formidables.
Rick Panegy